[b][u]L'Ecureuil et les Banques Populaires veulent convoler[/u]
PARIS (Reuters) - Les instances de contrôle des Banques populaires et des Caisses d'épargne ont donné leur feu vert à des négociations pour rapprocher une bonne partie des activités des deux groupes, à l'exception notable de leurs réseaux, et donner naissance à un deuxième poids lourd de la banque mutualiste en France derrière le Crédit agricole.[/b]
Les deux prétendants ont décidé d'aller de l'avant malgré l'opposition de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui, actionnaire à 35% de la Caisse nationale des Caisses d'épargne (CNCE), l'organe de tête du groupe L'Ecureuil, a indiqué qu'elle ferait jouer son droit de veto sur un projet dont elle a été tenue dans l'ignorance.
Ils se sont donné jusqu'au 1er juin pour conclure un accord définitif sur ce projet, dont les grandes lignes avaient été largement éventées dans la presse depuis vendredi et qui devrait voir le jour en décembre prochain.
Le schéma envisagé prévoit ainsi un regroupement des banques de financement et d'investissement des deux groupes, Natexis et Ixis, ainsi que de plusieurs filiales spécialisées comme le Crédit foncier (crédit immobilier) ou la Cie 1818 (banque privée), dans une entité baptisée Natixis.
L'ensemble serait contrôlé à parité à hauteur de 34% par les Banques populaires et les Caisses d'épargne, un minimum de 25% du capital étant placé dans le public.
Natixis se substituera à Natexis, la filiale cotée des Banques populaires, et la parité entre les deux groupes sera obtenue par l'addition des actifs transférés, l'émission de certificats coopératifs d'investissement (titres de propriété sans droit de vote) en provenance des banques régionales des deux groupes et, si nécessaire, un complément en cash.
QUESTIONS SUR LA VALORISATION
Le véhicule aura une capitalisation boursière qui devrait dépasser 20 milliards d'euros et devrait distribuer la moitié de ses bénéfices en dividendes.
Charles Milhaud, le patron opérationnel des Caisses d'épargne, présidera le conseil de surveillance de Natixis et le président des Banques populaire Philippe Dupont le directoire.
Les deux partenaires entendent conserver le contrôle de leurs réseaux d'agence, qui représentent une force combinée de l'ordre de 20% du marché français, mais consolideront leur accord par un échange de participations entre leurs organes centraux, la CNCE et la Banque fédérale des banques populaires.
Dans un communiqué publié en fin d'après-midi, la CDC a souligné qu'elle n'avait été informée à aucun moment des discussions avec les Banques populaires, alors que le pacte d'actionnaires de la CNCE prévoyait qu'elle soit associée à toutes les décisions stratégiques des Caisses d'épargne, et estimé que le projet portait "gravement atteinte" à ses intérêts, ce qui l'amènera à faire jouer son droit de veto.
La création de Natixis signifie de fait l'abandon du projet d'introduction en Bourse de la CNCE, prévu pour fin 2006, que la Caisse des dépôts poussait depuis qu'elle avait apporté la totalité d'Ixis aux Caisses d'épargne en 2004 afin de rendre sa participation dans l'organe faîtier du groupe plus liquide.
L'autre problème soulevé par la CDC tient à la valorisation des actifs apportés par les Caisses d'épargne à Natixis qui, sur le papier du moins, sont plus importants que ceux des Banques populaires.
INTERROGATIONS SUR LA CNP
La Caisse ne peut enfin que s'interroger sur le sort de sa filiale CNP Assurances, numéro un de l'assurance vie en France, dont elle contrôle 36,7% du capital dans le cadre d'un pacte d'actionnaires qui la lie aux deux premiers clients de la CNP, La Poste et les Caisses d'épargne.
Ces deux dernières détiennent via une holding commune, la Sopassure, 35,68% de la CNP, la question étant de savoir si L'Ecureuil aura encore besoin de la CNP alors qu'il trouvera dans Natixis la filiale d'assurance vie des Banques populaires qui pourrait, à terme, devenir son fournisseur pour ce produit.
Pour les Banques populaires et les Caisses d'épargne, Natixis présente comme principal intérêt une mise en commun des usines de fabrication de produits financiers et de traitement des encours de ceux-ci, des process qui nécessitent des investissements de plus en plus coûteux sur le plan technologique.
Il leur permettra aussi, en regroupant leurs moyens, d'être un acteur plus conséquent dans les métiers de banque de grandes entreprises et de marché même s'ils resteront à distance des poids lourds français que sont BNP Paribas et Société générale, et même du Crédit agricole.
Natixis pourra enfin leur servir de véhicule pour des acquisitions payées en actions qui permettraient un développement à l'étranger alors que le statut coopératif des deux groupes constitue sur ce plan un véritable handicap.
S'il répond ainsi à une logique économique forte, ce schéma comporte aussi des inconvénients, à commencer par celui du contrôle conjoint de Natixis par les Banques populaires et les Caisses d'épargne, deux groupes qui ne sont pas opéables et qui sont dirigés par deux fortes personnalités, Philippe Dupont et Charles Milhaud.
"C'est une situation (le contrôle conjoint) qui a montré maintes fois ses limites dans le passé", dit un observateur.
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